Je me souviens des circonstances qui m’ont conduit en 2013 à créer l’Agence Conseil Marianne Europe. A cette époque le statut d’auto entrepreneur existait déjà mais la gamme de possibilités s’étendaient. La banquière qui m’a reçue m’a dit : « On ne sait pas très bien ce que ça va donner, on va attendre pour avoir un peu plus de recul’.
Bien pratique mais sans grande sécurité pour les créateurs, ce statut a cependant tenté plus d’un million d’entrepreneurs. Ceux qu’on appelle les indépendants. Il répondait en effet à deux besoins sociétaux : celui de permettre à un grand nombre de professionnels ayant été licenciés de rebondir, celui de pouvoir apporter une source de revenus à des personne non employables (âge…) ou non désireuse de retourner travailler dans une entreprise (taux croissant de burn out…)
Le succès de la micro entreprise liée à la simplification des démarches et la possibilité de démarrer avec 0 euros, ne s’est pas démenti. Il a été concomitant avec une forme de rejet de la gestion des ressources humaines dans les entreprises. On a vu ainsi s’établir nombre de coachs, consultants, conseillers, artistes, auteurs, y compris chez les plus jeunes, y compris au sortir des grandes écoles, qui loin d’avoir l’idée de faire fortune se sont épanouis dans une autre forme d’offre de services, de créativité et de relations.
Le confinement lié au coronavirus, avec ses conséquences économiques, montre à quel point tous les maillons de la chaîne son étroitement liés. Un million d’indépendants qui ne travaillent plus et que deviendront alors les banques, les chercheurs de compétences rares ou à la carte, et même les édiles qui redoutent que leur ville ne sombrent sous le poids de « familles assistées » ?.
Alors pourquoi dans sa précipitation à vouloir soutenir l’économie, le gouvernement a-t-il « oublié » les indépendants ?
J’ai vu passer sur le profil de Nicolas Frébourg, conférencier issus de la grande entreprise figurant sur le catalogue Acme50, « la lettre d’un indépendant se préparant à la crise de nerf« .
Pour avoir eu nombre d’échanges avec des salariés en poste, sur l’intérêt de s’inscrire dans une démarche d’indépendant, je veux leur dire deux choses :
– Là ou un créateur d’entreprise classique investit de l’argent, l’entrepreneur indépendant investit du temps et souvent sur ses propres deniers, à ses risques.
– Le temps qu’il passe à se former, « monter en compétences » comme on le dit si bien aujourd’hui dans le jargon des formateurs et des RH, est quelque chose qui ne coûte pas grand chose à l’État (à comparer avec l’argent investi dans les seules startup par exemple).
Le prix de sa liberté s’accompagne très largement de non paiements, de changement de cap inopinés, de demandes en terme de prix sous la ligne de flottaison, de la méconnaissance de ce que reflète la composition d’un prix ou une démarche de développement.
En revanche, le service rendu par les indépendants créateurs de micro entreprises (leur nom maintenant) est immense. Celui de ne pas encombrer les couloirs du Pôle emploi, ou les CCAS municipaux, celui de produire une imagination et une agilité inspirantes, encore trop peu présentes dans nombre d’entreprises, celui de former une réserve de personnes mentalement saines, innovantes et aisément mobilisables.
Rien n’est plus stimulant que de développer son propre projet.
Alors quand l’État décide d’indemniser les entreprises pour la perte potentiellement enregistrée d’une année sur l’autre en prenant comme référence le mois de mars 2019, je dis à l’unisson de beaucoup de micro entreprises et d’organismes qui les représentent, par exemple la CPME, que c’est un non sens. Regardez-donc de quelle manière évolue le chiffre d’affaires d’une micro entreprise.
Pour beaucoup d’entre elles, après les gilets jaunes, les grèves de la SNCF et maintenant le coronavirus, le chiffre d’affaires soit passé des montagnes russes à la forme aplatie de la crêpe.
Alors qu’avec le « Corona », tout d’un coup, micro, petites ou grandes entreprises, nous sommes tous dans le même bateau (ou dans le même bain !).